Photo © Isolda Agazzi
A l’OMC, la Suisse s’oppose à une proposition de l’Inde et l’Afrique du Sud, soutenue par une centaine de pays, de déroger temporairement à l’accord sur les ADPIC pour produire plus rapidement et en plus grande quantité des tests et des vaccins. Une décision pourrait être prise le 4 février
Alors que dans les pays industrialisés certains refusent de se faire vacciner, dans les pays pauvres beaucoup aimeraient le faire, mais n’en ont pas la possibilité car il n’y a pas de vaccins.
Le 18 janvier, Dr Tedros, le directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’a affirmé sans ambages : “Plus de 39 millions de doses de vaccin ont été administrées à ce jour dans au moins 49 pays à revenu élevé. Seulement 25 doses ont été administrées dans un pays à faible revenu. Pas 25 millions; pas 25’000; seulement 25″. Je dois être franc : le monde est au bord d’un échec moral catastrophique – et le prix de cet échec sera payé en vies et en moyens de subsistance dans les pays les plus pauvres du monde”.
Les mécanismes mis en place au niveau international, à commencer par le Covax (une initiative conjointe de l’OMS et l’Alliance Gavi) sont insuffisants. La production ne suit pas car les pays riches ne veulent pas partager la technologie et le savoir-faire, privilégiant les monopoles sur la propriété intellectuelle et le nationalisme vaccinal.
La propriété intellectuelle, obstacle à une production plus rapide
Pour essayer d’inverser la tendance, l’Inde et l’Afrique du Sud ont présenté à l’OMC, le 2 octobre dernier, une communication demandant que les membres puissent déroger temporairement à certaines dispositions de l’Accord sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) pour produire plus rapidement des tests, vaccins et équipements dans le cadre de la pandémie de covid 19. Plus spécifiquement, il s’agit des droits d’auteur, des dessins et modèles industriels, des brevets et de la protection des informations non divulguées. En clair, une entreprise pharmaceutique locale pourrait produire ces biens rapidement, sans devoir tenir compte des questions de propriété intellectuelle.
Depuis lors, la proposition a reçu le soutien d’une centaine de membres, dont la Chine, mais elle se heurte à l’opposition des pays industrialisés, à commencer par la Suisse, les Etats-Unis et l’Union européenne, et de quelques pays émergents. La nouvelle administration Biden n’a pour l’instant pas donné de signes de vouloir changer de politique par rapport à celle de son prédécesseur. Les opposants affirment que la propriété intellectuelle n’est pas un obstacle à la fabrication des vaccins, ce qui est contesté par une récente étude de Médecins sans frontières.
Ils ajoutent que l’accord sur les ADPIC contient déjà les flexibilités nécessaires à affronter la pandémie. Celui-ci prévoit deux mécanismes : les licences obligatoires, par lesquels un pays peut décider de suspendre les brevets sur un médicaments afin de produire et commercialiser des génériques. Mais celles-ci sont difficiles à mettre en œuvre et se heurtent à de fortes oppositions politiques de la part des pays producteurs, comme la Suisse. Et les licences facultatives, qui sont cependant laissées au bon vouloir des entreprises pharmaceutiques et dont les termes sont opaques.
Pression des ONG, dont Alliance Sud, et de l’Inde sur la Suisse
De nombreuses ONG, dont Alliance Sud, et organisations internationales, dont l’OMS, soutienne cette demande de dérogation. L’argument selon lequel celle-ci pourrait freiner la recherche sur le covid-19 ne tient pas puisque les pharmas ont largement profité des fonds publics pour produire les vaccins en un temps record.
Début décembre, le ministre indien du commerce a explicitement demandé au Conseiller fédéral Guy Parmelin de soutenir la proposition de dérogation, alors que la Suisse et l’Inde sont engagées depuis plus de dix ans dans la négociation d’un accord de libre-échange qui bute précisément sur la requête suisse de renforcer les dispositions sur la propriété intellectuelle ; et dans la renégociation d’un accord de protection des investissements après que l’Inde a dénoncé l’ancien et en veut un plus équilibré.
Le 4 février prochain, le Conseil des ADPIC doit statuer sur la question et le Conseil général de l’OMC pourrait adopter une décision en mars.
La Suisse doit arrêter de s’opposer à la proposition de dérogation. Il en va du droit à la santé dans les pays en développement et de son intérêt propre puisque le covid – 19 ne s’arrête pas à la frontière.
COMMENTAIRES
Je ne comprends pas comment vous pouvez prendre une telle position.
Si les pharmas détiennent des brevets, pourquoi l’Inde ou l’Afrique du Sud serait en droit d’en demander l’usage ?
Est-ce que l’Inde viendrait à notre secours si nous avions une catastrophe sanitaire majeure ? NON
Pouvez-vous demander au DFAE si l’Afrique du Sud a prévu de faire vacciner les Suisses de l’étranger qui se présenteraient devant les autorités locales ? NON !!!!
C’est un exemple concret (vérifier par vous-même) car le DFAE ne soutient pas une vaccination pour ses ressortissants Suisse qui sont à l’étranger et demande à ceux-ci de voir avec le pays où ils sont !!!!! Et le pays leur dit d’aller voir ailleurs !
Avez-vous déjà pu vous rendre compte sur place des milliards que ces deux pays détournent grâce à une corruption endémique ? Ces milliards auraient peut-être dû être injectés dans la recherche non ?
Des ONG essayent de culpabiliser la Suisse, les entreprises qui travaillent dans ce domaine, et en définitif les employés qui travaillent dans la recherche pour ces firmes !
Au passage, c’est aussi ces employés qui payent des impôts, sur lesquels sont prélevés des montants incroyables pour financer des ONG comme la vôtre.
Si ce n’est pas juste, vous pouvez alors prendre une telle position !
Donc, votre position « socialo-humanitaire» de communautarisation des brevets sous couvert d’un pseudo soutient aux pays défavorisés n’est qu’un vœux pieux que certains gauchisant essayent de faire passer !
J’ose espérer que vous comprendrez la position d’un « petit sous-traitant » qui dépend du travail de nos pharmas !
Votre position de “sous-traitant” n’aurait pas à en souffrir, car la situation est le manque de vaccins par rapport aux 8 milliards d’habitants (même en Suisse), dans laquelle le temps est le problème majeur pour ne pas subir des années de pandémie.
Donc il ne s’agit pas de protéger des brevets, mais de sauver le monde!
l’Inde est en effet le pays de la zone Asie-Pacifique où dessous-de-table et pots-de-vin sont le plus l’Inde L’inde est en effet le pays de la zone Asie-Pacifique où dessous-de-table et pots-de-vin sont le plus pratiqués. Et les plus défavorisés sont les plus touchés : 73 % des pauvres doivent y recourir au moins une fois l’an, contre 55 % des plus favorisés, selon Transparency International, organisation controversée, mais seule à publier des études (lire « Qui enquête sur les enquêteurs ? »).
les liens entre milieu politique et financements obscurs nourrissent l’« empire des milliardaires », comme l’écrit le journaliste James Crabtree.
La gratuité est un leurre, mais nous devons prendre nos responsabilités et attribuer des licences obligatoires temporaire rapidement tel que déjà prévu dans les textes, les big pharmas, en s’opposant à ce droit à la vie, crée les conditions idéales pour générer du chaos dans beaucoup de pays y compris les soi-disants civilisés!
Comment peut-on hésiter à permettre la dérogation de la propriété intellectuelle des vaccins, même si il y a de la corruption, même si tout n’est pas rose! En effet, il s’agit aujourd’hui de penser aux populations, c’est essentiel. Par ailleurs, le financement par les états (donc les contribuables) pour la recherche du vaccins a été et est massif, pourquoi donc ne serait-ce pas les Etats qui possèderaient la propriété intellectuelle ? En effet, les états ont financé la recherche, ils se portent garants en cas de problème. Est-ce tout à fait normal que seules les Pharmas décident de ce qui est bon ou non pour l’humanité… c’est renversant…