A l’Abbaye de Citeaux, contemplation et labeur

A l’Abbaye de Citeaux, contemplation et labeur

Abbaye de Citeaux, le définitoire et la bibliothèque © Isolda Agazzi

Au cœur de la Bourgogne, l’abbaye fondatrice de l’ordre cistercien ouvre ses portes aux visiteurs quelques mois par an. Douze moines y vivent encore, plongés dans la prière, la lecture et le travail et tirant leurs revenus principalement de la fabrication de fromage. Une ode au silence et à la sobriété

C’est une énorme bâtisse qui se dresse en rase campagne au cœur de la Bourgogne, à un jet de pierre de Dijon. Douze moines y vivent dans le silence, la solitude et la contemplation. Fondatrice de l’ordre cistercien, l’abbaye de Citeaux ouvre aux visiteurs quelques mois par an et c’est avec bonheur qu’on pénètre sous la fraîcheur de ses voûtes en pierre, en ce mois de juillet écrasé par la chaleur. L’occasion d’approcher un mode de vie hors du temps et des hommes, qui intrigue et fascine.

Fondation de l’abbaye de Citeaux

Elle est le fruit d’une réforme en guise de retour aux sources : en 1098, 21 moines quittent le monastère de Molesme et arrivent sur un terrain marécageux rempli de roseaux – qu’on appelait cistels – où ils fondent l’abbaye de Citeaux. Leur but est de revenir à une ascèse plus rude, à la sobriété et à la pauvreté car, dans la plupart des monastères bénédictins de l’époque, les moines se détournaient du travail au profit de la prière.

Or, la règle de Saint Benoît de Norcia, fondateur des Bénédictins, n’était-elle pas ora et labora, prie et travaille ? Il en allait ainsi, par exemple, de celui de Cluny, situé à 130 km, mais plus habité aujourd’hui. Quelques années plus tard, Bernard de Clairvaux fit essaimer l’ordre cistercien dans toute l’Europe, y compris en Suisse en 1131.

En neuf siècles, l’abbaye a été témoin des soubresauts de l’histoire : au 13ème siècle elle a compté jusqu’à 200 moines. À la Révolution française, elle a été vendue et transformée en carrière de pierre ; à un moment, elle a même servi de colonie pénitentiaire, accueillant des milliers d’enfants pauvres, délinquants ou orphelins.

Vie en autarcie

Aujourd’hui les moines ne sont plus très nombreux, mais ils sont toujours actifs. Ils vivent en autarcie, selon la règle de Saint-Benoît, et possèdent 150 vaches qui leur permettent de fabriquer 250 à 300 fromages par semaine. L’abbaye est presque une petite entreprise qui paie des impôts et emploie une quinzaine de personnes. Mais son but, nous assure-t-on, n’est pas de faire des bénéfices et le surplus est versé à des œuvres humanitaires ou à d’autres abbayes. Lorsque les moines ne travaillent pas, ils s’adonnent à la prière et à la lecture, celle-ci commençant à 5h du matin.

Pour l’entretien, le monastère fait appel à des fondations car les besoins sont énormes. De l’immense propriété d’antan, il ne reste que trois bâtiments anciens : le définitoire, qui a servi de sucrerie, menuiserie et même d’hôpital pendant la 1e guerre mondiale. Le bâtiment monastique où vivent les moines. Et la bibliothèque avec son cloître. Au Moyen-Age, les moines étaient des nobles lettrés qui savaient le latin et jusqu’au 13ème siècle c’est seulement dans les monastères qu’étaient écrits les livres. Les copistes les copiaient et reliaient dans la galerie avec de l’encre qu’ils fabriquaient eux-mêmes, une corne de vache faisant office d’encrier. Pour une grande bible il fallait compter un an de travail.

7’000 cisterciens dans le monde

Les grands abbés cisterciens d’Europe se réunissaient chaque année dans le définitoire, pendant tout le mois de septembre, pour décider les grandes lois qui régissaient l’ordre. Aujourd’hui Citeaux n’est plus abbaye chef d’ordre et ces réunions se tiennent tous les trois ans à des endroits différents. Selon ses données, il reste 7’000 cisterciens dans le monde, hommes et femmes, répartis dans 330 abbayes sur tous les continents. La dernière a été fondée en Norvège en 2009 par quatre moines de Citeaux. Les règles suivies sont plus ou moins strictes : à Citeaux les moines, dits « trappistes », suivent la règle de la stricte observance, mais d’autres monastères, dits de la commue obédience, permettent un certain contact avec l’extérieur. En Suisse, il y a encore dix abbayes « vivantes », de religieux et de religieuses.

 

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