La plupart des ONG installées à Genève affirment ne pas trop souffrir de la crise du coronavirus, mais cela pourrait changer dès l’année prochaine. Elles saluent le formidable élan de solidarité du public et appellent l’Etat à continuer à les soutenir. Pour l’instant les autorités les écoutent, contrairement à d’autres pays
Le 20 mai, Oxfam international annonçait le licenciement de 1’450 collaborateurs (1/3 de ses effectifs) et l’arrêt des opérations dans 18 pays. Si ses difficultés financières avaient commencé il y a deux ans, suite au scandale de la pédophilie en Haïti, la baisse des dons résultant de la crise du coronavirus aura porté un grand coup à l’une des principales organisations de développement du monde. Ce n’est pas la seule: selon une étude publiée début mars, près de la moitié des ONG britanniques risquent de perdre leurs revenus volontaires et 1/3 leurs fonds tout court.
Quelle est la situation à Genève, qui abrite, selon les calculs, entre 400 et 750 ONG? Début mai, le Centre d’accueil de la Genève internationale (CAGI) a envoyé un questionnaire à 450 ONG, auquel 120 ont répondu.
98% des ONG impactées par la crise
« 98% des ONG se disent impactées par la crise, mais plus de la moitié jugent cet impact modéré, détaillait le 28 mai Julien Beauvallet, responsable du service ONG du CAGI, au Club suisse de la presse. Comme le Covid 19 est arrivé au printemps, qui est une période intense en conférences à Genève, ¾ d’entre elles ont dû diminuer leurs activités. La plupart ont réagi rapidement et mis en place des projets en lien avec le Covid 19, mais ¼ ont dû réduire leur personnel. »
Pourtant les perspectives sont très sombres : si pour l’heure l’impact financier est marginal (la plupart reçoivent des financements annuels ou pluriannuels), il y a une grande incertitude quant aux arbitrages budgétaires des donateurs (principalement des Etats et des organisations internationales) et à la place de la Genève internationale.
Chez les ONG de terrain, des dons qui pourraient ne pas durer
La plupart des ONG installées à Genève font du plaidoyer auprès de l’ONU. D’autres mènent des projets de développement sur le terrain, profitant de la synergie entre les nombreuses organisations humanitaires présentes en ville.
«Terre des Hommes Suisse travaille dans la protection de l’enfance dans une dizaine pays, explique Christophe Roduit, le secrétaire général. Si les enfants ne sont pas le visage de la pandémie, nous craignons qu’ils en soient les premières victimes. La crise risque de faire passer à la trappe les avancées des dix dernières années : en raison des mesures de confinement, 76% des élèves du monde entier ne vont plus à l’école. Beaucoup risquent de ne pas y retourner du tout et de devoir travailler, voire de tomber dans l’exploitation.»
40% des fonds de cette ONG proviennent de la Confédération et des cantons « qui ont fait preuve de beaucoup de flexibilité » et 60% des privés – particuliers, fondations, entreprises – « qui se sont montrés très fidèles. » Mais la grande menace réside dans des évènements grand public qui ont soit été annulés, comme la Fête de la musique et Paléo, soit sont incertains, comme la Marche de l’Espoir.
Même son de cloche chez Médecins sans Frontières (MSF), dont Liesbeth Aelbrecht, la directrice générale, salue « l’incroyable solidarité de la population, en Suisse et dans le monde ! » Ajoutant cependant que «nous sommes très inquiets pour 2021 car nos dons proviennent essentiellement du secteur privé, de fondations d’entreprise et de personnes comme vous et moi, et sans le face à face, cela va devenir compliqué.»
Une commission parlementaire propose d’augmenter le budget de la coopération
Quant aux financements publics, Genève représente la moitié des fonds alloués à la solidarité internationale par les collectivités locales suisses – un budget stable pour le canton et qui a même augmenté pour la ville. « Si on additionne les fonds du canton et de toutes les communes genevoises, on se rapproche des 30 millions de francs par an. Mais la question est de savoir si ces financements vont être reconduits », relève Stefan Davidshofer, du Global Studies Institute.
A Berne en tout cas, l’espoir est permis : le 27 mai, la Commission de politique extérieure du Conseil national a proposé de relever les crédits-cadres pour la coopération internationale de 241 millions de francs, par rapport au projet du Conseil fédéral, pour les années 2021 – 2024. Ces fonds supplémentaires correspondent à la somme totale nécessaire pour amener le taux d’aide publique au développement à 0,5 % du revenu national brut d’ici à 2024. Une augmentation qui, cependant, doit encore être acceptée par le Parlement.
« En Grande Bretagne, le gouvernement se retire du soutien aux ONG. En Suisse ce n’est pas le cas et c’est peut-être ce qui explique que la situation des associations y est moins inquiétante. Pour l’instant du moins», conclut Martial Paris, de WISE – Philanthropy Advisors.
Une version de cet article a été publié par Le Courrier
COMMENTAIRES
Ce qui est curieux, c’est qu’on n’en sache pas le nombre?
Maintenant, c’est sans doute comme le système onusien et autres G6 ,7,…20, OMC, FMI, BM, etc.
Sans mentionner que le multilatéralisme a du plon dans l’aile, combien de travaux de ces multiples organisation sont-ils redondants et effectués sans coordination?
Bonjour Olivier, ce n’est pas qu’on ne sait pas combien il y a d’ONG à Genève, c’est que cela dépend de comment on compte. Le CAGI recense 450 ONG, mais cela ne tient pas compte d’associations plus petites, composées parfois d’une seule personne. Si on compte tout, on arrive à plus de 700. Saludos!
Merci de votre réponse, Isolda.
J’avoue ignorer que l’on puisse faire des ONG d’une personne, mais pourquoi pas?
Je vais donc déclarer ma chacra, ONG, dans l’intérêt du beau, du bon (pas Dubonnet) et du bio uruguayen :)))))
Certaines ONG sont des machines à grossir le nombre de chômeurs et des assujettis à l’aide sociale chez nous à Genève. Plusieurs importent des employés et les licencient 2 ou 3 ans plus tard pour le faire porter par les contribuables genevois pour le restant de leurs vies. Puisque les ONG bénéficient d’aides publiques, ils ne devraient pas pouvoir importer en Suisse de la main-d’oeuvre étrangères. Très bon article, comme toujours !